Comment trouver sa propre personnalité musicale à travers les formes traditionnelles du flamenco, si souvent jouées et revisitées ? La soleá, la bulería, la petenera ou la taranta… Tous ces styles qui font l’âme du flamenco. Telle est la question posée par Maël Goldwaser au cours de son solo. À travers ses compositions, il ne cherche pas à reconstituer un flamenco historique mais propose une musique singulière qui s’appuie sur la rigueur d’une tradition musicale pour se déployer.
J’ai commencé à apprendre la guitare flamenca à treize ans, je me suis donc construit comme musicien à travers cette culture musicale et assez rapidement j’ai décidé que je voulais interpréter ma propre musique. Les formes du flamenco sont très restrictives : la plupart du temps, la structure rythmique et la tonalité ne sont pas laissées au choix du compositeur. Malgré cela, j’essaie de trouver à l’intérieur de ce cadre des espaces au sein desquels je peux m’exprimer en tant que musicien. Je m’efforce, quand je compose une pièce dans un style précis du flamenco, non seulement de respecter les structures rythmiques et les tonalités, mais aussi d’être fidèle à l’esprit du style et enfin d’exprimer quelque chose de personnel, de donner ma version de la Soleá, la Siguiriya, la Taranta, etc.
Le flamenco me donne un cadre que je peux explorer et une tradition sur laquelle je m’appuie pour composer et interpréter ma propre musique. L’apparente rigidité des formes du flamenco m’apporte une rigueur dans la composition et me permet de donner de la cohérence et du sens à ma musique.
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Nous venons d’assister à un très beau concert au Centre Mandapa. Une heure durant, la rigueur du compositeur et la sensibilité de l’interprète nous ont ravi. Distinguer ces deux aspects de la musique de Maël Goldwaser est d’ailleurs arbitraire, tant la finesse et l’intelligence d’écriture des pièces du programme impliquent un travail sur le son au scalpel : une riche palette de timbres et de couleurs sonores, assez rare chez un guitariste flamenco, une dynamique couvrant tout le spectre possible, de l’à peine audible au déferlement de puissants (et très précis) rasgueados, alliées à un usage très expressif des variations de tempo. Le format strictement acoustique du récital et la capacité réduite de la salle nous ont permis de n’en perdre aucune nuance.
Maël Goldwaser est scrupuleusement respectueux des formes du flamenco, non seulement de leurs compases, de leurs modes mélodiques et de leurs harmonisations, mais surtout de leur caractère et de leurs affects. Cet ancrage dans la tradition ne bride en rien sa créativité, mais plutôt la stimule, comme le démontrèrent notamment la petenera (un « palo » bien peu traité par les guitaristes solistes), la taranta et la siguiriya, à notre avis les trois compositions les plus profondément originales du programme. Mais toutes auraient mérité des écoutes répétées (à quand un enregistrement ?) – dans l’ordre : fantaisie « por granaína », soleá, colombiana, bulería « por taranta », et les trois susnommées.
En bis, le guitariste nous annonça une « fin de fiesta, pas « por bulería », mais plus conforme à mon caractère » : en substance, une délicieuse et nostalgique ballade arpégée, une sorte de schubertiade majeure/mineure. Si vous aimez la musique et si vous en avez l’occasion, ne manquez pas d’aller écouter Maël Goldwaser.
« Un premier album pour ce guitariste nouvellement, ou quasi, arrivé sur la scène jazz et alentours. Les alentours car le guitariste toulousain fraie avec l’aisance des grands, surtout dans les eaux claires du flamenco. Aussi n’est-on pas étonné de trouver ici un album de tout début de carrière et une inspiration majestueuse. En fait, pour tout dire, on avait déjà croisé Maël Goldwaser avec l’accordéoniste Arthur Bacon. Ces deux-là avaient signé un EP franchement bien inspiré lui aussi. De profundis – et le titre n’est pas mensonger – est du même acabit. Propos graves, quelquefois solennels, musique sérieuse, introspection, exigence envers soi-même, humilité et force du solo, tout y est, bien arrimé aux six cordes et à l’inspiration de ce musicien qu’il faudra suivre d’une paire d’oreilles attentive. »
« Il est des albums qui sonnent comme une évidence, au-delà des genres musicaux. C’est le cas du premier disque solo de Maël Goldwaser, guitariste et professeur pas encore trentenaire, installé à Toulouse, repéré par le réseau jazz en Occitanie pour une résidence avec Jazz à Junas. S’il s’inscrit dans le cadre codifié de la guitare flamenca et qu’il en explore chaque palo (stye) – petenera, buleria, solea, siguiriya… – Maël, en disciple de Manolo Sanlúcar, entend exprimer sa singularité dans ses compositions. Créer des moments suspendus, des nuances émancipatrices, au sein d’un système musical où la liberté est relativement restreinte. Par-delà le style musical, les pièces instrumentales de Maël font résonner la tension universelle des histoires intimes : les emballements, les nuits, les brûlures, les ruptures. Magnifique jusque dans la sobriété minérale du tryptique qui en compose la pochette, l’album a été enregistré par l’ingénieur du son toulousain Boris Béziat. »
« Maël Goldwaser anuncia rápidamente los toques flamencos, con sus característicos paseíllos rasgueados, para desarrollar un discurso armónico contemporáneo. Basado en sugerentes juegos sobre la dinámica que le permiten las diferentes técnicas de la guitarra flamenca, añade a ello la exploración de una rica paleta sonora sobre los timbres que producen estas técnicas de contrastes. (…) como su maestro Manolo Sanlúcar, es también un pintor de sonidos interiores, los de los afectos, los del alma. » (extrait)
« En duo avec l’accordéoniste Arthur Bacon, Maël Goldwaser avait produit l’année dernière un très intéressant et original premier disque intitulé « ¿ Flamenco ?« . Il suffit de supprimer les deux points d’interrogation pour qualifier très exactement son deuxième opus, intitulé » De Profundis « . Comme ce titre, l’intensité des photos d’Adrien Tache qui illustrent la jaquette annonce l’austérité du propos, qui n’exclut pas une sensibilité à fleur de peau : pudeur quant à l’expression, et exigence sans concession quant à la composition. » (extrait)
« Il y a beaucoup de pureté dans “De Profundis”, il s’écoute d’un trait et se bonifie avec le temps. » (extrait)